Le skipper de Gitana 11 pulvérise de plus de 4 jours le record de la reine des Transats. L'osmose parfaite entre l'homme, la machine et l'élément. La combinaison idéale. The right man at the right place. Comme un écho du concept fondateur de la reine des Transats : un homme, un bateau, un océan. Cette fois c'est un océan, un Gitana, un Lemonchois. Comme si c'était simple et tranquille. En tête depuis le 31 octobre et la sortie de Manche, Lionel Lemonchois signe ce matin, à 6h21 heure de Paris, un des plus grands exploits de l'histoire moderne de la course au large. Le record de la Route du Rhum-La Banque Postale est pulvérisé de 4 jours et 15 h et tombe à 7 jours 17h19m et 6s, soit 19,11 noeuds de moyenne sur la route théorique et plus de 20 noeuds sur la route effectivement parcourue par Gitana 11! Énorme sensation. Bienvenue dans la légende, Monsieur Lemonchois.
Victoire. Le grand trimaran bleu et blanc glisse comme un charme dans les tous petits airs antillais, pas représentatifs du tout de sa grande glissade transocéanique. Gitana 11 coupe la ligne dans un bouillonnement indescriptible et salue, hilare, la foule des mers. En écrin majestueux, la nuit caraïbe que la pleine lune illumine comme une poursuite au spectacle déroule un tapis royal pour la plus belle des conquêtes de ce marin de 46 ans né à Bayeux et citoyen de Crach', près de la Trinité-sur-mer. Une bonne centaine de vedettes essaime autour du héros. Pointe-à-Pitre tire une révérence royale à ce touche-à-tout de génie qui n'a laissé aucune chance à ses adversaires, menant de bout en bout la traversée de l'Atlantique. Comme si la fatigue et les éléments n'avaient pas de prise sur lui. Les accros du zodiaque noteront que l'homme est Verseau, signe d'air. De l'air - et du bon - il y en a eu sur cette transatlantique de rêve, presque exclusivement disputée au vent portant.
Il est 1h21 du matin en Guadeloupe, cinq de plus à Paris et Lionel, les bras en estuaire, fait scintiller les fumigènes rouges en entrant dans la Darse où la fête bât son plein. Il saute dans son trampoline, il lève les bras. Il l'a fait. Le rêve de gosse atterrit sur le ponton béni. C'est beau.
En 7 jours et 17 heures !
L'heure n'est guère aux calculs et pourtant. Ce n'est plus une performance c'est un exploit ahurissant que signe l'ancien pêcheur de coquillages, l'ex-préparateur technique, ce dingo de la mer et de la compétition sur tout ce qui flotte. Gitana 11 et Lionel Lemonchois bouclent cette Route du Rhum-La Banque Postale en 7 jours 17h19mn et 6s. Le record de Laurent Bourgnon, vieux de 1998 est amputé de 4 jours, 15h et 22mn ". C'est incroyable, c'est génial, participer à la Route du Rhum c'est déjà un rêve, mais gagner! Je crois que je ne réalise pas encore. Je rêve, je rêve, je suis aux anges ", lâche le marin, " le bateau ne naviguait pas, il volait ! ".
Les chiffres donnent en effet le tournis. Lionel Lemonchois a bouclé les 3 542 milles de la route théorique à 19,11 noeuds de moyenne. Avec les 255 milles courus en plus de la route théorique - un chiffre exceptionnellement faible révélateur d'une météo idéale qui permettait d'aller vite quasiment sans rallonger la route - cette même moyenne de vitesse grimpe à 20,49 noeuds ! On croyait ce genre de performance éventuellement accessible aux équipages - et pas à cette époque de l'année - mais surtout pas à un solitaire. C'est le moment de se souvenir qu'au départ de St Malo, le 29 octobre, les douze pilotes de trimaran misaient sur une traversée en 10 jours.... Ils sont loin les 23 jours de Mike Birch, lors de la première édition en 1978.
Alors oui, Lionel Lemonchois peut danser dans le trampoline de sa merveilleuse machine. Oui, le Baron Benjamin de Rotschild peut être fier de " son " skipper. De toute la saga des prestigieux Gitana armés par la branche franco-suisse des Rotschild, c'est ce marin-là qui signe la plus belle des victoires. Le Rhum en 7 jours et 17 heures. On se répète le chiffre. "Il faut que je le retienne", dit le principal intéressé. C'est finalement le Président du Conseil Régional de Guadeloupe, Victorin Lurel, qui trouve le mot juste : " vous avez débaptisé l'épreuve. Ce n'est plus la Route du Rhum, c'est l'autoroute du Rhum ! "
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