Ces polyglotes en culottes courtes |
Autre exemple : le Collège Louise de Savoie à Chambéry, comporte deux classes européennes. Une italienne et une allemande. |
| En 1992, une circulaire du ministre de l'éducation annonçait la mise en place dans les collèges de sections dites européennes : outre l'apprentissage renforcé d'une ou plusieurs langues vivantes, les élèves y reçoivent l'enseignement de disciplines non linguistiques, dispensées dans la langue de la section. L'organisation d'activités culturelles et d'échanges vient enrichir encore ce cursus qui a le vent en poupe. |
Depuis 1996, le collège Notre-Dame-du-Rocher, surnommé " Le Rocher " propose cet enseignement avec comme choix linguistique l'anglais. Sa directrice, Mme Hostache en est pleinement satisfaite. "Lorsqu'en 1996 nous avons ouvert la section européenne au Rocher, le projet était déjà mûrement réfléchi, confie Mme Hostache, principale du collège. Très tôt, j'ai été convaincue que l'anglais devenait incontournable : sa prédominance est évidente dans l'internationalisation des échanges, le développement des relations commerciales intercontinentales, l'expansion des liaisons aériennes, maritimes, ou encore le dialogue mondial de la recherche scientifique. Sans compter son monopole dans la musique ou l'Internet." Pour répondre au besoin de se former à la langue de Shakespeare, toutes les écoles privées catholiques de Chambéry enseignent l'anglais dès la moyenne section de maternelle. A l'entrée en 6ème, le terreau est alors propice à un approfondissement au sein des classes dites européennes. Sur les dix-neuf classes que compte le Rocher, douze "battent pavillon" étoilé sur fond d'azur; ce qui correspond à trois classes par niveau, de la 6ème à la 3ème. Un nombre qui ne cesse d'augmenter depuis 1996.
En plus des quatre heures d'anglais hebdomadaires propres à l'enseignement classique, les sections européennes du Rocher comptent deux heures supplémentaires, dispensées par des enseignants de langue maternelle anglaise ou américaine. "Ces professeurs, avec toute la richesse de leur différence incarnent ainsi cette culture étrangère, et apportent au sein de l'école cette réalité du monde ! " s'enthousiasme Mlle Hostache. Pour faciliter l'échange durant ces cours axés exclusivement sur l'anglais oral, les classes sont divisées en petits groupes de quinze élèves au maximum.
Comme il n'existe pas encore de programme officiel émanant du ministère de l'Education, le contenu de ce volume horaire est totalement à la charge des professeurs. Tout est à inventer, en harmonie avec les autres membres du corps enseignant de l'établissement : en effet, il ne s'agit pas de cours d'anglais traditionnels, mais bien de l'enseignement d'une partie du programme d'une discipline non linguistique. Les professeurs doivent donc travailler ensemble afin d'élaborer la cohérence et la complémentarité de ce cursus. A titre exemple, au " Rocher ", les 6ème étudient en anglais européen la portion du cours d'histoire géographie consacré à l'Egypte. Il en est de même pour certains chapitres du programme de biologie.
Dans les sections européennes, l'accent est aussi porté sur la connaissance de la culture du pays dont la langue est étudiée. Les grands évènements de la vie quotidienne sont abordés : fêtes populaires, religieuses, évènements politiques, sportifs, musicaux etc. Cette connaissance est enrichie par la communication individuelle ou collective, grâce au courrier électronique, avec des établissements américains. Des échanges viennent enfin concrétiser cette démarche d'ouverture : cette année, des liens ont été tissés avec St Albans, près de Londres, ainsi qu'avec un établissement de Malte. Une "entente cordiale" couronnée par l'organisation d'un week-end dans la capitale anglaise, et par un voyage dans l'ancienne colonie britannique, où les élèves ont pu suivre des cours dispensés dans un institut de formation. "Cela, avant même que cette île au passé d'exception ne rentre dans l'Union Européenne ", précise la principale.
"Les élèves qui choisissent ces sections doivent posséder une très grande motivation et une certaine curiosité pour aller à la rencontre d'autres peuples" souligne t-elle encore. Pour y être à l'aise, Il faut cependant déjà maîtriser à l'oral comme à l'écrit sa propre langue maternelle. L'anglais a beau être la langue internationale qui permet l'ouverture au monde, il ne faut pas négliger pour autant le français, ses richesses, ses subtilités. Ne forge t-il pas notre identité ?
Arrivés en fin de 3ème, les élèves issus de ce parcours enrichi ont la possibilité de le prolonger au lycée : St Ambroise propose par exemple un baccalauréat avec mention européenne ; ses professeurs sont d'ailleurs en relation étroite avec ceux du Rocher, afin que la transition s'opère au mieux. Les bacheliers qui en sont issus, très à l'aise au niveau des échanges et décomplexés vis à vis d'une formation à l'étranger, sont très recherchés par les universités européennes. "Ce programme est une des possibilités proposées au Rocher, mais il en existe d'autres, conclut la directrice. Un établissement se doit d'offrir une diversité de projets, d'initiatives, afin de ne pas se cloisonner, se scléroser. En plus de l'enseignement classique et européen, nous avons aussi des classes à caractère scientifique, et d'autres de consolidation pour les élèves en difficulté. A la rentrée, nous aurons également un projet dont l'objectif, via un camion école, est la scolarisation des enfants des gens du voyage, de l'âge des collégiens. Goethe ne disait-il pas que "L'Europe est née en pèlerinage"?"
Fabien Guichardan pour le journal Alp'Horizon Savoie, édition de septembre 2004 |
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