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Les prisonniers de Miolans

Les prisonniers de Miolans

la cellule purgatoire © 123 Savoie

la cellule purgatoire © 123 Savoie

Mise en ligne : Sergio Palumbo et Daniel Bouvier-Belleville, 123 Savoie

Le château de Miolans, une prison d’état

Lire notre article : le château de Miolans Le château de Miolans est situé sur les hauteurs de Saint-Pierre-d’Albigny dans la Combe de Savoie. Il est visible depuis l’autoroute A430 (MontmélianAlbertville) et se visite de mai à septembre.

Le château fut transformé en prison d’Etat en 1564 et ce jusqu’à la Révolution française en 1792. La capacité fut variable tout au long de ses 228 années de fonctionnement : 3 en 1563, 4 à 23 de 1586 à 1689, 56 de 1713 à 1734, 18 de 1757 à 1773, 10 de 1788 à 1792.

199 prisonniers y furent enfermés dont : 60 Piémontais, 12 Calvinistes ou Vaudois, 3 Français, 3 prisonniers de guerre, 121 Savoyards. Parmi ces prisonniers, il y avait : 22 ecclésiastiques, 51 nobles, 25 fils de famille, 26 militaires.

Les causes d’emprisonnement

Les causes d’emprisonnement étaient : 71 pour des délits de droit commun, 26 prisonniers politiques, 2 pour cause de folie.

Les délits de droit commun pouvaient-être : – Délit contre les biens : Incendie, vol, non-paiement de dette. – Délit contre l’ordre public : Contrebande, espionnage, désertion, faux, conjuration, révolte, trahison, intelligence avec l’ennemi, lèse-majesté, ivrognerie.

croquis du château de Miolans


Les vêtements des prisonniers

Une fois arrivés dans la prison, les détenus gardaient les vêtements qu’ils portaient sur eux lors de leur arrestation. Il fallait un ordre spécial du gouvernement pour obtenir des chaussures et des habits aux prisonniers. Les prisonniers qui étaient à la charge de leur famille n’étaient guère plus heureux, car ces derniers étaient lents à se manifester. Certains gardaient même le lit, car ils n’avaient pas de linge et de vêtements de rechange. Le Comte de Rubat dut supplier le gouverneur de Miolans afin qu’il puisse écrire à sa femme pour que celle-ci lui envoie du linge.


Le régime de détention

Les prisonniers ne devaient communiquer avec personne. Seul le gardien, chargé de porter les repas, pouvait recueillir et échanger quelques paroles, mais toujours en présence du gouverneur de Miolans. De plus les prisonniers ne pouvaient pas écrire et communiquer avec l’extérieur : avocats, familles, amis… Il fallait un ordre de Son Altesse Royale pour qu’un médecin ou un confesseur puisse rentrer dans Miolans.

Les gouverneurs successifs exerçaient leurs fonctions avec une sévérité et une très grande rigueur : Noble Louis de Mondovi, fit mettre Charles Roux, un des révoltés de Mondovi, pendant trois ans aux cerps (des fers aux mains et portant une ceinture en fer de 25 kg). Il en fut libéré grâce au gouverneur suivant qui eut pitié de lui.

Le Colonel Pierre Le Blanc ne perdait jamais de vue ses prisonniers. Il accompagnait les geôliers dans toutes les visites de jour comme de nuit. Il furetait partout à la recherche d’une anomalie dans l’état de chaque prison, afin de prévenir toute tentative d’évasion. Le moindre acte d’indiscipline était puni avec une rigueur excessive, dans un ordre croissant qui était : – l’Enfer, la prison la plus rigoureuse. – Le jeûne. – Les fers aux pieds et les menottes aux mains. – Les chaînes au cou. – Les cerps. – La bastonnade.

L’un des prisonniers, un capucin défroqué, nommé Chiapella fut dès son arrivée à Miolans, mit à « l’Enfer », reçut la bastonnade et fût « momifié » par des chaînes à tel point qu’il ne pouvait plus bouger. Plus tard on lui octroya un peu plus de liberté. Mais pour l’empêcher de se tuer, on lui mit un collier de fer relié à trois chaînes, l’une à gauche, l’autre à droite et la troisième reliée à une pierre de 600 kg. Tout cela afin de restreindre ses mouvements au centre de la cellule de l’Enfer.

De Launay, fut à l’inverse des deux Gouverneurs ci-dessus, plus doux et plus humain. C’est sous son autorité qu’il y eut l’évasion du Marquis de Sade.

Lire notre article : L’évasion du Marquis de Sade à Miolans
peinture du château de Miolans

peinture du château de Miolans

 

Les cellules de Miolans

Le château de Miolans fut transformé en prison d’Etat en 1529. Les cellules étaient au nombre de 12 : trois dans la tour dite de Saint-Pierre, neuf dans le Donjon. Chacune portait un nom bien définit.

Dans la tour de Saint-Pierre

– prison d’en bas – prison du milieu – prison d’en haut La disposition des cellules de la tour Saint-Pierre isolait les prisonniers. La cellule du milieu donnant à l’ouest et les deux autres au sud.

tour Saint Pierre © Daniel Bouvier-Belleville

tour Saint Pierre © Daniel Bouvier-Belleville

Dans le Donjon

Le nom des cellules a une certaine importance. Il permet de se rendre compte du niveau de punition (ou de confort) de chacune d’elle : – l’Enfer : Cette cellule est située au pied du donjon. Elle ne possède qu’une petite fenêtre donnant au Nord. Elle est sombre, froide, humide. C’était la prison de rigueur et de punition. – le Purgatoire : Cette cellule est placée juste au-dessus de l’Enfer, de dimension à peu près identique à celle-ci. Elle possède une grande fenêtre au sud avec une petite cheminée à l’est, la rendant plus saine et chaude que la précédente.

la cellule purgatoire © 123 Savoie

la cellule purgatoire © 123 Savoie

– Le Trésor : Cette cellule est située au-dessus du Purgatoire, elle possède aussi une grande fenêtre au sud et une grande cheminé à l’est. – L’Espérance : Cette cellule est située au-dessus des appartements du commandant du fort qui lui-même se trouvait au-dessus de la cellule du Trésor. C’est l’une des meilleurs « cellule » avec elle aussi une grande fenêtre au sud et une grande cheminée à l’ouest. C’est dans cette cellule que se trouvait le Marquis de Sade. – La Petite-Espérance : Cette cellule est située au même niveau que l’Espérance, mais de plus petite superficie. Elle ne possède qu’une fenêtre au nord. C’est dans cette cellule que se trouvait le valet du Marquis de Sade. – Le Paradis : Cette cellule est située au sommet du donjon. Elle est contrairement à « l’Enfer » la plus chaude, avec une fenêtre au sud et une cheminé à l’ouest. – Le petit-Paradis : Cette cellule est identique à celle de la Petite-Espérance. – Le 1er Corridor : Cette cellule est située à l’ouest du donjon et plus petite que les précédentes. Elle possède une grande fenêtre au sud et servait aussi de confessionnal. – Le second Corridor : Cette cellule est située au-dessus et elle est identique à la précédente.

donjon © Daniel Bouvier-Belleville

donjon © Daniel Bouvier-Belleville

Source : « Mémoires et Documents de la SAHA » tome XVIII.

 

Les prisonniers de Miolans

Vincent-René Lavini, incarcéré pour complicité à l’escroquerie : fausse reconnaissance de dettes et faux billets de banque, en 1767 pour une durée de 21 ans.

Pierre Giannone, condamné pour avoir écrit « l’histoire du royaume de Naples » ou il professait la suprématie de l’état sur l’église. Il fut incarcéré le 7 Avril 1736 à Miolans jusqu’au 23 Juin 1738. Il a un buste dans l’université de Naples.

Pierre Monod, jésuite et conseillé de la régente Christine de France. Elle le fit incarcérer à Miolans afin de le protéger de Richelieu. Celui-ci rendit le jésuite responsable du refus de la régente, sur la cession des principales places fortes du Piémont à la France.


Miolans connut aussi 20 évasions : 13 réussies, 7 qui échouèrent

– Le 9 Juillet 1658, Charles Roux fit une corde avec ses draps et un trou dans le mur pour s’évader. Il fut trouvé meurtri, par les gardiens, dans les vignes en contrebas de la forteresse et ramené dans sa cellule. – Le 29 Juin 1734, le chevalier de Martiniano, fit un trou dans le mur de ses latrines. Il fit tellement de bruit que ses gardiens en furent alertés. – En 1672, Jean-Marie Barbéris et Cigneto, firent une première tentative. Le premier fut ramené à Miolans. Quand au deuxième, il lâcha la corde trot tôt et fut retrouvé le lendemain, les vertèbres du cou enfoncées, les côtes, les bras et les cuisses fracturés. Plus tard Barbéris renouvela la tentative, mais la corde étant trop courte il appela au secours ses gardiens pour être secourut. – Le 26 Juin 1679, Lamberti réussi a faire un trou dans le plancher de sa cellule, grâce au couteau que le tambour Fricout lui avait donné, pour atteindre celle de Barbéris. Tous les deux avec une corde faite avec leur drap, réussirent à s’échapper et arrivèrent deux jours plus tard à Genève. – Appiano et de Vars réussirent à s’échapper grâce à un fer et un clou, une corde faite de leurs habits et des draps. Ils réussirent à démolir une petite fenêtre de leur cellule (cellule du « Paradis ») fraîchement mise. – Le 30 Mars 1719, François Freylin s’évada, mais il tomba sur des rochers et mourut 3 mois plus tard. – Sigismond Péguin, de Rumilly, fut incarcéré en 1761 à la demande de sa mère. Il s’évada en août 1763. Il avait brisé les chaînes qu’il avait aux pieds, et s’en servit pour crocheter une porte. De là, il parvint aux latrines dans lequelles il descella une pierre de taille. A l’aide d’une corde d’infortune il descendit d’une hauteur de 16 mètres et gagna la Tour d’Arve, près de Genève.

Marquis de Sade

Marquis de Sade

Mais le plus connu des prisonniers de Miolans reste le Marquis de Sade, qui s’en évada le 30 Avril 1773.

Lire notre article : L’évasion du Marquis de Sade à Miolans

17 prisonniers sont morts dans les prisons de Miolans

Pierre Monod, le 30 Mars 1644. Ballade, le 28 Septembre 1652. Jean-Baptiste Mazin, le 30 Avril 1661. Barthélémy Barriglieti, le 17 Septembre. Jean-Jacques Cigneto, le 3 Mars. Charles Roux, le 13 Juillet 1677. Jean-Thomas Stellani, le 27 Novembre 1678. Pasteur Chaunié, le 8 Décembre 1689. François Freylin, le 7 Juillet 1720. Jean-Antoine Garitta, le 6 Novembre 1725. Marianne Muratore, le 18 Juillet 1727. Della Mora, le 26 Juin 1733. Antoine-Gaëtan Albanelli, le 5 Novembre 1740. Pierre Joseph Cavagnol, le 30 Juin 1741. Chanteran, le 16 Septembre 1765. Bernad Bongivanni, en Juin 1785

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Le château de Miolans culmine à 550 mètres d’altitude sur un éperon rocheux séparé par le col de l’Arclusaz qui culmine à 2.064 mètres. Il se situe à la croisée des routes menant au Sud vers la Maurienne et le Mont-Cenis, à l’Est vers Montmélian et Chambéry et à l’Ouest vers la Tarentaise et le Petit Saint Bernard…

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